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Bitcoin et blockchain : quelles opportunités ?

  • Thomas P. Hossen
  • 10 mars 2021
  • 6 min de lecture

Bitcoin a été créé par un développeur inconnu sous le pseudonyme de Satoshi Nakamoto en 2009, à la suite de la crise des subprimes : c'est donc un projet qui prend source dans un contexte de méfiance et de défiance vis-à-vis de la finance traditionnelle et des institutions. Plus précisément, l'objectif de Bitcoin est de créer un système de paiement sécurisé, décentralisé et inclusif (accessible avec une connexion internet) : le projet se concrétise par la création de la première blockchain publique, c’est-à-dire, pour paraphraser la définition de l’Assemblée Nationale, un registre, une grande base de données qui a la particularité d’être partagée simultanément avec tous ses utilisateurs, parmi lesquels les détenteurs de ce registre ont également la capacité d’y inscrire des données selon des règles spécifiques fixées par un algorithme (protocole informatique) sécurisé grâce à la cryptographie. Depuis Bitcoin, de nombreux projets se sont développés autour de la blockchain, et de nouvelles opportunités sont apparues, jusqu’à constituer un véritable écosystème que l’on nomme « finance décentralisée ».


Bitcoin, un « crypto-actif » plutôt qu’une « crypto-monnaie »


L’environnement du Bitcoin et de la blockchain étant particulièrement récent, il est difficile de qualifier précisément la nature du Bitcoin, et en particulier de dire si le terme même de « crypto-monnaie » est bel et bien approprié. En effet, Bitcoin, de par l’algorithme qui le définit, s’apparente à une représentation numérique d'une valeur qui n'est pas émise ou garantie par une banque centrale ou par une autorité publique, qui n'est pas attachée à une monnaie ayant cours légal et qui ne possède pas le statut juridique d'une monnaie, bien qu’elle soit acceptée par des personnes physiques ou morales comme un moyen d'échange et qui peut être transférée, stockée ou échangée électroniquement. Le Bitcoin ne remplit donc pas les trois fonctions aristotéliciennes de la monnaie : difficile à utiliser comme un intermédiaire d’échange ou comme une réserve de valeur de par la volatilité extrême de son cours, Bitcoin ne peut pas non plus être légalement utilisé comme unité de compte.


Il n’empêche que l’intérêt croissant que portent les institutionnels (grandes banques, banques centrales, courtiers en bourse…) et les grandes entreprises (PayPal, Dell, Expedia, Microsoft…) vis-à-vis du Bitcoin et de la blockchain montre à quel point cet écosystème est novateur. L’algorithme des blockchains publiques est en effet parfaitement transparent : toutes les transactions sont publiques et le registre doit être accessible à tous. De plus, l’environnement de la blockchain est désintermédié : la transaction est portée directement à l'adresse de réception, ce qui limite les frais de transaction (dus à la présence d’une chambre de compensation notamment).


Par ailleurs, les blockchains publiques sont déréglementées et déterritorisées : nulle autorité étatique ne régule pas la création, les transactions ou le cours ; c’est un écosystème qui est soumis uniquement aux lois du marché et qui ne peut pas être manipulé par les politiques monétaires et économiques des gouvernements et des banques centrales. Bitcoin évite ainsi les restrictions monétaires gouvernementales : c’est pourquoi, en 2013, les titulaires d’un compte de dépôt chypriote supérieur à 100 000 euros, notamment les Russes, ont acheté massivement du Bitcoin pour éviter un bail in, tandis que les transactions en Bitcoin en Grèce en juillet 2015 ont crû de 300 % pour contourner les limitations des retraits bancaires.


Le fonctionnement sécuritaire d’un système décentralisé : le rôle des mineurs


La décentralisation inhérente aux blockchains publiques nécessite malgré tout un processus de validation des transactions fiable et sécurisé. En effet, chaque transaction aboutit à l'issue d'un processus de validation à une écriture (bloc) sur le registre, qui forme alors une chaîne de blocs horodatés (d’où le nom de blockchain). Dans le cadre du Bitcoin, il est nécessaire d'utiliser la puissance de calcul de son ordinateur pour valider le premier la transaction (en résolvant un problème complexe) : on parle de preuve de travail. Ce problème complexe correspond grossièrement à la vérification de l’intégrité d’une signature numérique (de la même façon qu’un chèque est signé, une transaction en Bitcoin l’est numériquement, et la validation doit aboutir à vérifier que l’émetteur de la transaction est bien le signataire de celle-ci).


Dans le cadre du Bitcoin, les nœuds certificateurs constituent des mineurs ; plusieurs transactions d'un bloc doivent être validées, et le premier mineur à tous les valider reçoit une récompense (tokens créés par le processus de minage et frais de transactions), les autres rien. Bitcoin souffre donc d'un problème écologique majeur, car de l'énergie est gâchée (certains mineurs valident pour rien). C’est pourquoi, afin d’accroître la probabilité d'être le premier à résoudre le problème, les mineurs fédèrent leur puissance de calcul (appelée hashrate, nom issu du fait que le résultat obtenu après vérification des mineurs se nomme un hash) au sein de coopératives, appelées fermes ou pools (F2Pool, AntPool…), afin de mutualiser les coûts et les gains.


Le risque de corruption de la blockchain par une pool hégémonique est alors théoriquement possible. En effet, si plusieurs validations sont nécessaires pour ajouter effectivement l'échange au registre, dès lors qu’une pool détient au moins 50 % de la capacité de calcul, elle peut valider des blocs corrompus (transaction fictive par exemple) ; le bloc corrompu devient alors majoritairement validé et il n'est plus possible de le corriger : on parle d’attaque 51 %. En pratique, une telle attaque serait cependant trop coûteuse.

Le statut juridique des mineurs pose cependant toujours problème : la seule barrière à l’entrée pour devenir mineur étant donc la puissance de calcul, rien ne garantit que les investisseurs, en particulier les institutionnels, aient confiance en des nœuds de validation anonymes. En effet, en absence d’autorité de régulation, de lois ou de juridiction dans l’environnement acéphale qu’est la blockchain, comment gérer un conflit et comment un investisseur peut-il faire valoir ses droits ? C’est pourquoi, après Bitcoin, d’autres blockchains, dites permissionnées, ont été développées : les nœuds de validations sont alors prédéfinis (c’est le principe de la preuve d’autorité).


L’achat de Bitcoins sur les plateformes d’échanges : opportunités et risques


Bitcoin représente de nombreuses opportunités pour les particuliers qui peuvent s’en procurer sur des plateformes d’échange comme OKCoin (pour le yuan), Bitfinex (pour le dollar), Binance ou Kraken (pour le dollar et l’euro) notamment. Bitcoin permet en effet des transferts d’argent pour des frais réduits, de l’ordre de 1 % des transactions, quand une transaction bancaire classique (notamment pour des devises différentes) peut coûter jusqu’à 5 % de frais.


En outre, Bitcoin offre dans une certaine mesure un certain anonymat (plus exactement, Bitcoin est pseudonyme : dès qu’on achète des tokens sur une plateforme d’échange, cette dernière dispose de notre identité même si sur les échanges en Bitcoins ne figurent que des adresses sans identité). Ce « pseudo-anonymat » est à double tranchant : il facilite en effet les transactions illégales, et le site Silk Road, l’équivalent de l’Amazon du dark web fermé en 2013, dont les transactions se réalisaient exclusivement en Bitcoin (et en Monero, une autre cryptomonnaie anonyme), montre les travers auxquels peut amener l’utilisation de Bitcoin.


Par ailleurs, si la blockchain Bitcoin n'a jamais été violée dans son intégrité, certaines plateformes d'échange de bitcoins ont déjà été piratées. L'exemple canonique est le piratage de Mt. Gox, plateforme historique créée en 2009 sise au Japon, piratée une première fois en 2011 (80 000 bitcoins disparus) : entre 2011 et 2014, 630 000 bitcoins ont été débordés en exploitant une faille informatique du site. Au total, 750 000 appartenant aux utilisateurs ont été volés (200 000 ont été retrouvés), entraînant la faillite de Mt. Gox le 28 février 2014, et une chute du cours du Bitcoin par la suite.


Un algorithme limité par sa logique de création monétaire et son manque de scalabilité


Le Bitcoin est donc un instrument financier extrêmement volatil et soumis à des comportements spéculatifs. Cette volatilité est accentuée par la logique purement mathématique de création monétaire du Bitcoin. En 2021, à chaque bloc de transactions validé, 6,25 Bitcoins sont mis en circulation (récompense des mineurs ou coinbase), et un bloc est miné toutes les dix minutes en moyenne. Si une telle logique évite tout biais inflationniste, elle n’est cependant pas toujours économiquement optimale : il y aura trop de Bitcoins en circulation lorsque le cours chutera, et pas assez lorsque le cours s’envolera.


En outre, la volatilité du Bitcoin fait qu’il peut difficilement être utilisé comme un moyen d’échange. C’est pourquoi seule une infime partie des Bitcoins est effectivement utilisée pour les transactions financières. Ainsi, en 2016, seuls 4 % des Bitcoins en circulation étaient utilisés hebdomadairement, 24 % dans les trois mois et 50 % dans les six mois, tandis que plus du tiers serait conservé au-delà d’un an. Le Bitcoin s’apparente donc presque à un placement, à une réserve de valeur.


Par ailleurs, le réseau Bitcoin est vite saturé : il ne pouvait supporter en 2016 que sept transactions par seconde (plutôt 15 en 2021), très loin des 2000 transactions par seconde validées par le protocole Visa. Cette absence de scalabilité, c’est-à-dire de mise à l’échelle, limite les possibilités de généralisation de l’emploi de Bitcoin à grande échelle.


Perspectives


Si Bitcoin souffre de limites qui empêchent son adoption à grande échelle, la blockchain ne se résume à une seule cryptomonnaie. Les applications de la blockchain et des cryptomonnaies sont en effet multiples : dans le domaine bancaire, la blockchain peut ainsi offrir la possibilité de valider des transactions sans intermédiaire, ce qui limite les coûts de transaction ; dans le domaine de l’assurance, elle peut permettre d’automatiser les procédures de remboursement et d’alléger les formalités administratives ; dans le domaine logistique, elle peut faciliter le suivi de la traçabilité d'un produit au sein d'une chaîne de production ou de distribution ; dans le domaine immobilier, on peut imaginer enregistrer des actes notariés sur le registre inviolable de la blockchain, ce qui très intéressant notamment dans les pays corrompus (failed States).

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